Inara est une belle femme. Elle le sait, elle a eu très tôt l’habitude de faire de son corps l’instrument de sa volonté et, aujourd’hui, ce fait la dégoûte quelque peu. De taille moyenne, de silhouette élancée et gracieuse, elle possède des formes pleines, un peu rondes. Elle a modelé son pas, jusqu’à ce que ça devienne inconscient, pour accentuer l’ondoiement subtil de ses hanches et de ses longues jambes, lui donnant une allure féline. Chacun de ses gestes paraît dédié à la beauté et à l’élégance. Son visage ovale, sculptural, aux menton pointu, aux traits réguliers et ciselés est éclairé par de grands yeux en amande, d’un noir de velours, surmontés de sourcils en croissants de lune. Sa bouche charnue invite au baiser, bien qu’un certain air hautain se peigne sur son minois au naturel. Sa peau dorée prend un joli hale cuivré sous le soleil. Elle possède quelques cicatrices, que la chirurgie n’a pas réussit à effacer, comme des petits trous près du nombril ou une longue balafre derrière la cuisse droite. Sa très longue chevelure d’un brun mat très sombre se pare de reflets colorés selon la teinture qu’elle choisit. Coquette, elle aime prendre soin d’elle, arbore bijoux et maquillage lorsqu’elle le peut. Mais elle fera toujours attention à ce que cela ne gêne pas ses mouvements – déformation professionnelle. Sous sa peau satinée roulent des muscles néanmoins puissants, car son corps est rompu aux arts martiaux. Fait notable qui va de pair avec sa profession officielle, elle possède une superbe voix de soprano.

Il y a deux Inara. Estimez-vous heureux de ne connaître que la seconde, bien que la première fasse de temps à autres quelques retours. Personnalité lumineuse, au charisme solaire, Inara est une femme sociable, attachante et naturellement joviale. Elle aime faire la fête, profiter de tous les petits plaisirs de la vie, rencontrer de nouvelles personnes et découvrir de nouvelles choses. Hédoniste jusqu’au bout des ongles. Elle aime les longues promenades au bord de la mer, faire de l’équitation, peindre, chanter… Souvent d’humeur égale, elle essaye de s’émerveiller de chaque jour qui lui est accordé à vivre et d’en profiter. Plutôt altruiste, elle compatit beaucoup à la misère d’autrui et vous trouverez souvent une main secourable chez elle. Inara est une force tranquille, qui ne montre pas ses peurs – surtout celle de la solitude et du rejet – et qui dit ce qu’elle pense. Intelligente et cultivée, ouverte d’esprit, elle est habituée à user de diplomatie pour exprimer ses opinions. Courageuse au point d’en paraître froide et invincible, elle est aussi réfléchie et très observatrice. Elle prend rarement des décisions à la hâte. Voici celle qui vint sur la nouvelle planète.
Mais parfois resurgit la Inara de la Terre, une femme arrogante, qui ment sans l’ombre d’un tressaillement, à l’intelligence retorse et implacable, à la rancune tenace et à la main prompte à administrer la mort, qui sait user de toutes les armes à sa portée pour parvenir à ses fins. Cette femme-là, aveuglée par son endoctrinement et sa soif de vengeance, lui fait peur mais elle ne peut pas nier qu’elle ait existé. Ni qu'elle existe encore quelque part. Il est si facile de céder à ses anciennes habitudes.

Inara Al-Abbas, dont le nom signifie « lion » dans sa langue natale, est née à Téhéran dans une famille modeste. Sa mère était issue d’une famille d’éleveurs de chevaux, d’où l’amour que portera très tôt la petite fille à ces animaux. Son père était un employé de bureau : ce fut du moins ce qu’elle crut jusqu’à sa majorité. Depuis longtemps le côté paternel de sa famille avait un pied dans les Services de Renseignements Iraniens, anciennement VEZAK. Et comme son père, son frère et sa sœur de quelques années plus âgés qu’elle, Inara entama rapidement une double-vie.
Sa mère mourut de maladie à ses treize ans. Et l’adolescente un brin naïve et suffisante qu’elle était à l’époque surmonta son chagrin en voulant devenir meilleure que tous les autres membres de sa famille. Embrigadée et entraînée, mentalement et physiquement, elle devint effectivement meilleure que son frère ou sa sœur, fit la fierté de son père et, lorsqu’elle fut officialisée agent, comme eux, on décida de surveiller cette graine prodige.
En parallèle, Inara décida de mener des études administratives extrêmement ennuyeuses puis se tourna vers une carrière artistique. Rien n’était trop beau pour elle. En apparence, elle avait tout pour être heureuse : des amis, des amants, un début de carrière de chanteuse et un travail passionnant. Très dangereux. Inara avait été formée aux armes, aux arts du combat, à l’infiltration et l’espionnage. Elle savait si bien mentir parce qu’elle ne parvenait parfois plus à dire ce qu’elle ressentait vraiment, ni ce qu’elle désirait en réalité. Elle commença à se faire une petite réputation à l’agence, pour ses bons et loyaux services, après quelques missions périlleuses à l’international qui ne la laissèrent pas indemne. Elle n'était pas la meilleure ni la plus remarquable mais assurément elle ne passait pas inaperçue. Et sa famille était fière d'elle.
Elle prit un congé improvisé sur un coup de tête, que son père couvrit, tandis qu’elle se réfugiait quelques jours chez ses grands-parents maternels. Elle redécouvrit la sérénité d’une vie sans mensonges ni perfidie, sans coups bas et sans devoir surveiller ses moindres faits et gestes. Et elle s’aperçut que cette vie lui manquait, qu’elle s’était perdue depuis longtemps dans des ambitions creuses car elle n’était plus qu’un pion. Un instrument de mort pour son pays, pays que malgré tout elle aimait. Elle ne savait même plus qui elle était vraiment. Son père voulut la rassurer, lui affirmant que tous les espions passaient un jour par cette crise d’identité mais qu’elle ne devait pas mettre en péril son avenir. Mais lorsque son frère revint blessé et défiguré d’une énième mission, elle craqua.
Inara demanda à quitter le service actif. En devenant un agent de réserve, elle espérait pouvoir se reconnecter à ses réels besoins – et ne plus subir la pression des autres. Elle prépara sa fuite, patiemment car on ne quittait pas l’agence sans lourde contrepartie. Inara voulait vivre pour elle-même. Elle savait qu’elle aurait beau fuir à l’autre bout de la Terre, elle n’y parviendrait pas. Alors elle partirait au-delà des étoiles.
Elle n'avait qu'un seul regret sincère : partir sans ses grands-parents, trop âgés et trop attachés à leurs terres. Son frère ne comprenait pas sa décision mais il l'acceptait. Son père tempêta mais finit par se résigner. Seule sa sœur refusa les adieux, l'accusant de les abandonner sur un caprice.
Inara Al-Abbas, célèbre chanteuse lyrique qui apparaissait en concerts solo, en invitée d’opéra ou de groupes de musique, postula pour rejoindre le Projet Noé. Elle ne put pas dissimuler ses activités d’espionne et elle craignit que cela ne fasse obstacle à son dossier. Elle sut presque au dernier moment que sa candidature était acceptée, après de multiples entretiens, muant ses angoisses en d’autres. Et si le nouveau gouvernement sur la prochaine planète faisait appel à ses services… C’était un risque à prendre. Embarquée sur le vaisseau Avalon, elle fut réveillée au mois 5 après l’atterrissage en catastrophe. La nouvelle planète lui parue magnifique et dangereuse – à l’image de son pays d’origine. Mais le désastre ne vint pas de là où elle s’y était attendue. Elle fut découverte neurocompatible.
Elle voulait participer à la vie et au développement de la colonie. Pas de problème ! Mais pas comme ça ! Avec cette maudite Ecaille, elle redevenait un instrument de mort au service d’autrui. Elle n’en avait aucune envie ! Inara s’obstina à être une très mauvaise élève pour apprendre à devenir une bonne Guerrière d’Avalon et refusa d’assister à nombre d’entraînements, quitte à s’attirer les foudres du commandement. Elle ne voulait pas redevenir celle qu’elle avait été avant. Et ce n'était pas une alerte de niveau 5 qui allait la forcer à réendosser son rôle...

* Citation du film Kingdom of Heaven

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