En s’engageant dans l’armée coloniale, il ne s’était pas attendu à ça et il avait dû apprendre à gérer de nouvelles responsabilités. Bon, il savait que les officiers supérieurs devaient se farcir un sacré paquet de paperasse et devenant commandant, il était rentré dans ce petit cercle très fermé. Mais une part de lui était un peu vexée quand même, il n’avait pas eu son grade par le mérite et le travail, mais par nécessité et parce qu’il était le seul péquin valable à pouvoir tenir le rôle. Le faire passer de capitaine à commandant n’était qu’un moyen de lui donner une légitimité comme chef de section. Sa position était encore précaire auprès des autres militaires et il devait en plus composer avec les civils.

La nuit était déjà bien avancée quand il eut enfin fini sa paperasse du jour. Il aurait pu simplement aller se coucher, il avait l’avantage d’avoir un bel appartement en tant qu’officier, mais il avait envie de se détendre, aussi bifurqua-t-il vers le seul bar sympa de la colonie et même, seul bar tout court pour le moment. Le Trou dans la Paroi était déjà bien animé à cette heure-ci, beaucoup avaient besoin de se détendre et la soirée était déjà avancé, ça buvait, riait, dansait, draguait. Thomas esquiva la foule et se trouva une place au bar avant de se commander une pinte.

Peu de temps après, il eut du mal à manquer l’armoire à glace qui venait de se poser à côté de lui. Luis Higan était capitaine, comme lui avant, il avait sympathisé avant le départ et lors des quarts de sécurité à bord du vaisseau. Le même grade permet de rompre la glace plus facilement. En même temps, c’était à cause de lui si le fier marines s’était retrouvé photographié dans une pose à la Jojo’s. Et maintenant, il avait son adorable petite sœur comme porteuse d’Écaille à l’Uther.

Luis, si c’est pour me menacer de mille tourments s’il arrive quoi que ce soit à ta petite sœur chérie, prend un numéro et fais la queue, t’es pas le premier, j’en gère cinq par jours et le père de Teresa, c’est tous les deux jours.

Et il avait fallu que ce dernier soit le cliché de l’italien à grande gueule particulièrement casse-couille. Le ton de Thomas démontrait clairement sa fatigue, aussi bien mentale que physique.

Et promis, j’essai pas de coucher avec non plus.

Une musique électro rythmait légèrement le pub le plus côtoyé de la Planète, et c’est peu dire. Avec quelques collègues, on avait décidé de passer chez Marcus ce soir. De toute façon, j’avais fait savoir que je ne partirais pas sans boire la tourner du patron. Demain, c’est mon jour de repos. Donc, je peux profiter à fond de la soirée, et de la nuit. Bien sûr, nos conversations allaient à nos rares sorties, ou aux dernières nouvelles de la colonie. Comme par exemple le rapprochement de certains colons, les premières relations amoureuses, les paris sur qui était client de Sophia, ou encore, le nombre de verres qu’on pouvait s’enfiler dans le Trou, avant que Marcus ne nous vire pour état d’ivresse avancé. Une soirée comme les autres, entre un petit groupe de militaires où les blagues volent en rase-motte. Je ne suis pas très fin sur le sujet il faut dire et le premier à faire le con pour épater ou rire la galerie.

Je venais de finir ma troisième pinte de la soirée, et j’étais encore loin de l’ivresse. A peine un peu chauffé par l’ambiance. Cependant, alors que je répondais à un pote, je vis passer un type pas du tout inconnu. Je pris ma pinte vide, et j’informais que je repasserais plus tard.

« Cap’tain, j’vous rappelle qu’il est commandant maint’nant.
— Yep. Et j’te rappelle, Sergent, que t’es l’premier bourré à cette table ! »

Les rires qui accompagnèrent sa mine bouffie, et son « C’est pas faux » me mettait de bonne humeur. Au milieu des gens qui dansaient, de ceux qui buvaient, je prie la direction du comptoir. Plus précisément, je m’installais à côté du puits.

« Marcus ! Une autre, onegai. »

Ma voix grave restait audible malgré la musique. J’y pense, j’espère qu’on aura de vrais artistes à l’occasion car la musique électronique, ça va dans un bar ou en soirée, mais avoir des gens sur scènes c’est mille fois mieux.

« To… »

Je ne pus pas commencer, qu’il prit les devants. Roh ! C’est vrai que j’allais le menacer pour Marie, mais pas que ! Le ton fatigué, par contre, me laisse penser qu’il faut qu’il souffle le lascar ! Par contre, alors que je m’apprêtais à boire un verre de ma nouvelle choppe, sa réplique me fit avaler de travers ma bière. LE CON !

« Keuf keuf ! »

Essayer d’avaler de la bière de travers, et on en reparle. Enfin, le visage grave tournait vers lui, mes yeux le dardaient en mode « fais pas l’con l’ami ».

« C’est le boulot qui te donne des élans suicidaires, Tom ? »

J’avais du mal à l’appeler Thomas. Comme tout les Thomas d’ailleurs. C’est quand même le prénom d’un de mes frères restés sur Terre. Mais j’ne préfère pas y penser. Buvant une saine lampée, je repris mon calme et j’ajoutais :

« J’ai confiance en Marie, elle a suffisamment bon goût pour t’esquiver. »

Il y avait un peu de moquerie dans ma voix, mais je savais bien qu’il blaguait. En attendant, tout en demandant quelques amuses bouches qui sont des sortes de mini-cube de rations, je vins à poursuivre un peu plus inquiet dans le ton.

« T’as l’air KO mon pote. T’en ferais pas un peu trop ? »

Y’a des soirs avec et y’a des soirs sans. Et ce soir, il n’avait pas envie d’écouter monsieur muscle l’embêter avec sa petite sœur, car il le ferait de toute façon. Alors il lui trancha l’herbe sous le pied et lui coupa le sifflet aussi sec. Le faire taire n’avait pas de prix parfois. Il détendit tout de même l’atmosphère en disant ne pas chercher à draguer la petite sœur en question. Il avait manqué de s’étouffer, ce qui était bien dommage toute cette bière gâchée. Le grand frère déclama la confiance qu’il avait en sa sœur, se payant la tête de Thomas au passage.

J’en doute pas, vu de qui elle se rapproche en ce moment… Et à mon avis, ils parlent pas que boulot.

Il le provoquait, ouvertement, car Luis ne saurait jamais s’il blaguait ou pas et maintenant, il aurait le doute, ce qui constituait une belle vengeance. Quand l’intéressé lui demanda s’il n’en faisait pas un peu trop. Il le regarda avec ses yeux fatigués et une mine blasée.

J’en fais même pas encore assez. On m’a promu uniquement parce que je suis le seul péquenaud compatible et suffisamment gradé, je dois monter une section de combat composée au trois quart de civils, avec de l’équipement expérimental, contre une faune géante et belliqueuse. À quelques données neurologiques près, tu te retrouvais à ma place.

Thomas fit signe au patron de l’arroser encore une fois, il avait besoin d’une autre bière au minimum s’il devait supporter les conneries habituelles de son vieux pote.

Mon sourire se figea, et c’est le regard vif, comme si j’étais prêt à partir en mission commando, que je demandais :

« Qui ? »

Et gare à lui s’il n’est pas assez bien pour Marie ! Je ne laisserais pas un sale type blesser le cœur de la princesse de la famille. Déjà que je dois surveiller Tom, me voilà à devoir penser qu’elle en attire d’autres ?! Je sais qu’elle est adorable, douce et gentille, mais ce n’est pas une raison pour flirter avec ma sœur d’abord ! Et si mon esprit était en ébullition, juste trahit par la crispation de mes membres supérieurs, mon visage se contentait d’une froide neutralité. Pour autant, l’attitude du « jeune » commandant me fit hausser un sourcil. Puis, prenant un peu de recul, j’osais quand même demander :

« Tom… Tu me fais marcher, c’est ça ? »

Je ne savais pas si je devais lui en vouloir, ou rire de ma propre bêtise. Mais dans le doute, j’irais me renseigner de si quelqu’un tourne autour de Marie ces-derniers temps. Si je dois avoir un beau-frère, il faut qu’il passe les critères de validation. Et puis, l’attitude crevée proche du KO technique du responsable pratique de l’Uther m’inquiète un peu. Son regard me suffit à me dire que sa réponse ne va pas me plaire. Pourtant, alors qu’il évoque le fait de ne pas assez en faire, je me contente de boire ma bière.

« T’oublies que t’as été réveillé avant moi, donc, si j’avais été compatible je n’aurais pas eu la super promotion pourrie. Mais j’aurais préféré être compatible à la place de Marie, c’est sûr. »

Je fis un autre signe au barman, pour avoir du whisky plutôt que de la bière. Je venais de finir la mienne un poil vite pour le coup, mais je me dis qu’un alcool qui tape fera plus d’effet à Tom ce soir.

« T’en fais trop. Ou plutôt, y’a trop à faire pour un seul type, tout aussi gradé qu’il soit. T’as demandé si tu pouvais avoir du backup ? Un secrétaire ça te déchargerait. Ils devraient peut-être aussi penser à un toubib je me dis pour votre section. Ou plutôt, pour rassurer les proches sur la santé et l’état psychologique des conscrits. Enfin, le jour où on saura faire taire un Italien : on m’préviens. J’en avais un dans ma sortie y’a trois jours, t’as pas idée du débit sonore et de la portée en décibel qu’il peut émettre ! »

Je tendis mon verre de whisky vers le sien, avant d’ajouter :

« Trinquons au fait que tu sois sorti de la paperasse tu veux ! Et au fait que tu n’as pas dragué ma sœur aujourd’hui. »

Un clin d’œil accompagna ma réplique, moi aussi je sais faire de l’humour l’ami ! En attendant, je buvais une lampée, soit presque tout mon verre, et j’ajoutais :

« Au passage, tu les as encore ? »

Je montrais du doigt des photos quelconques servant à la décoration, comme pour savoir s’il avait toujours ce danger en sommeil dans ses datas !

Luis était vraiment idiot quand il s’y mettait. Être un peu protecteur envers sa sœur était une chose, mais chez lui, ça en devenait de la bêtise profonde. Enfin, il ne fallait pas s’étonner non plus de son manque de succès auprès des femmes pour la peine. Quand il lui demanda s’il le faisait marcher, le commandant de l’Uther lui fit un sourire narquois.

Peut-être pas tant que ça, va savoir. Tu sais mon vieux, si t’as pas envie de passer pour un dangereux siscon, va peut-être falloir que tu lui lâches la grappe à ta sœur, elle n’a pas autant besoin d’être protégée que tu crois. Et puis franchement, je ne suis pas allé vérifier, mais à son âge, il est très probable qu’elle ne soit plus vierge depuis longtemps.

Il allait peut-être détruire son précieux petit univers, mais il serait temps qu’il ouvre les yeux. Le boulot arriva sur la table et ils en parlèrent paperasserie et responsabilité.

Va savoir, s’ils avaient eu plus de choix en gradés, ce ne serait peut-être pas moi qui ferais ce job. Ce ne serait pas toi non plus,  les siscon sont jamais objectifs.

Il ne perdrait jamais une occasion de le vanner là-dessus, sa sœur était un point d’attaque idéal pour l’embêter.

Ouais, une charmante secrétaire, ce serait sympa, mais va en trouver une qui sait faire le travail ET passer sous le bureau. Mais bon, blague à part, il me faudrait effectivement un assistant administratif, ou deux.

Tout en parlant, il continuait de boire sa bière et fit signe au barman de remettre une couche pour lui et monsieur muscle. Lequel lui posa une question qui tira à Thomas un étrange rire bas et sadique. Nul besoin d’en dire plus, oui, il les avait et n’aurait aucun scrupule à s’en servir.

Je grommelais à sa réplique. Et tout en buvant un peu de ma boisson, je tins à corriger son affirmation :

« Je suis peut-être à moitié jap l’ami, mais je ne suis pas adepte des animes de loli, shota, siscon ou brocon. Et je ne préfère pas penser au dernier point que tu évoques. Mon âme n’est pas prêtes à cette idée… Après, j’avoue, j’adore ma petite sœur mais c’est une saine affection ! Et puis… »

Mon regard se voila l’espace d’un instant, alors que je pensais à Kay, Toma et Sara. Rien que de penser à eux me pinça le cœur, et me rappela que ce voyage était sans retour. Eux, comme mon père, je ne les reverrais pas.

« C’est la seule petite sœur qu’il me reste alors bon, ouais, j’y tiens. »

Un sourire vint se greffer sur mon visage, puis, mon regard se fit joyeux et même blagueur alors que j’enchaînais sur le ton de la confidence :

« Et ma mère me démontera s’il arrive quoique se soit à sa princesse adorée ! Tu n’sais pas comment elle peut être la vieille ! Je te jure, y’a pas plus teigneux quant il s’agit de ses petits ! Une vraie dragonne !! Elle te fout la paix car je me charge de jouer le fer de lance… Mais je peux te dire que l’père de l’italienne, c’est un ange à côté d’ma mère. »

Et je ne rigole qu’à moitié. Maman Higan est une force de la nature. En attendant, notre conversation dériva sur le travail. A son pessimisme je me permis de réagir.

« Si on avait été plusieurs gradés, j’aurais refusé et appuyer un autre candidat pour ma part. En dehors de mon trouble notoire –ironie quant tu nous tiens– je ne me sens pas de diriger et de former des civils. Je suis entré dans chez les Marines pour leur patriotisme, leur rigueur et leur philosophie. Un conscrit, j’aurais du mal à savoir comment le motiver ou l’aider. Je ne saurais que voir la personne que j’ai fait serment de protéger. »

Sur ce point, on peut dire que je ne ferais pas du tout en bon commandant. Déjà que le grade de Capitaine m’avait mit mal à l’aise à son obtention. J’avais dû quitter le terrain sauf en de très rares cas… Et cette sensation d’envoyer mes hommes, et femmes, au casse pipe sans pouvoir être autre chose qu’un backup efficace m’a souvent frustré. Pas pour rien que sur la fin, je faisais surtout de la formation. Une façon de m’assurer que la nouvelle génération pourrait affronter n’importe quelle folie humaine.

Le rire fut assez communicatif à sa boutade sur la secrétaire. On notera que j’avais proposé un homme pour esquiver la plaisanterie usuelle. Mais bon, on ne se refait pas entre mec !

« J’crois que pour ça, faut prendre le problème à l’envers Tom. Je connais une charmante fille qui acceptera sans soucis de passer sous le bureau contre « rémunération » on dira. De là, y’a qu’un pas pour lui demander de faire le café et de préparer la paperasse. »

Un clin d’œil accompagna ma réplique ainsi qu’un rire bien fort et gras. En parlant de truc gras, je me renseignais sur une cause quasi-perdue. Et apprendre qu’il avait encore ces preuves compromettantes me fit glisser ma large paluche dans la nuque.

« Tu penses me lâcher la grappe sur ça un jour ? Sérieux… J’ai déjà perdu une part de ma virilité avec le pari qui impliquait la perte de ma pilosité. Tu vas pas enfoncer le clou en diffusant cette erreur de jeunesse ? »

Tu parles d’une erreur de jeunesse ! C’était un peu avant de monter à bord et de finir en stase ! Paie ton argument Rui. Mais en attendant, on nous resservait et la soirée était agréable. Tout est toujours plus sympa en compagnie d’un ami.

Bien évidemment qu’il allait enfoncer le clou et rendre à Luis toute la sympathie qu’il lui envoyait en se payant sa tête quand il pouvait. Et vu que ce dernier était le grand frère gaga à sa petite sœur, il était évident qu’il y avait là un angle d’attaque particulièrement efficace et savoureux.

Argument invalide, avec tes muscles et ton absence de pilosité, tu as déjà la carrure pour poser dans des magazines étranges.

Ça, c’était envoyé. Il lui fit ensuite tout le discours sur la seule petite sœur qui lui restait et tout un argumentaire sur le fait que sa mère était une sorte de dragon capable de déchainer les enfers au  nom de sa petite fille chérie et adorée. Ce à quoi le commandant répondit avec une certaine ironie.

Non mon grand je ne sais pas. Je n’ai aucune idée de ce que c’est que d’avoir une mère protectrice, vu que la mienne ne s’est jamais vraiment occupée de moi.

A bien y penser, il n’était pas sûr d’avoir abordé le sujet avec lui. Si lui avait parlé en long et en large de sa mère et sa petite sœur, Thomas n’avait probablement jamais évoqué sa famille un peu compliquée. Le travail revint bien vite sur la table et Thomas comprenait le point de vue de Luis, en partie du moins.

Partir à l’aventure comme ça, c’est pas super patriotique pourtant. Mais bon, je comprend ce que tu veux dire, on est sensé protéger les civils, pas les envoyer au feu. Mais on n’a pas le choix, alors je préfère les préparer à ça que de pleurer sur la situation.

C’était aux scientifiques et aux techniciens de régler ce problème, pas à lui, il ne pouvait que faire avec et au mieux de ses capacités. Fort heureusement, Luis sut le divertir d’une boutade sur les secrétaires.

Je vois de laquelle tu parles. Je devrais peut-être l’engager pour un peu de détente à l’occasion. Toi aussi ça pourrait pas te faire de mal et ça t’enlèverait cette image de siscon.

Non, il n’allait pas le lâcher avec ça, c’était trop marrant. Il essaya une dernière fois de justifier cette histoire de photo compromettante, mais Thomas ne répondit toujours rien, se contentant de ce petit rire amusé de maître du mal savourant son plan maléfique.

Un sourire orna mes lèvres, alors que j’ajoutais en rigolant :

« Comment peux-tu savoir que le futur magasine playboy de la colonie m’a contacté ? »

Mais le sujet revint vite sur ma famille. Pourtant, l’expression de Thomas me fit tiquer. Et ce sont ses mots, très acide, qui me permit de comprendre. Je m’étais toujours étonné qu’il soit venu seul mais, à première vu, ses relations familiales n’avaient pas l’air au beau fixe avant le départ. Pour le coup, et un peu pour m’excuser, je fis signe au barman de nous servir une autre tournée. A mes frais. Enfin, contre mes tickets de rationnement pour être exact.

Je préférais donc changer de sujet. On a tous le temps d’en reparler quant il le voudra. Déjà, c’est la première fois qu’il évoque sa famille en ma présence et ça me fait un peu plaisir. Peut-être qu’il s’ouvre un peu l’nouveau Commandant.

« Bah, déjà, j’ai toujours eu deux pays cher à mon cœur. Et soyons franc, en terme historique, ce n’est pas un mariage qui a toujours bien marché. Alors bon, on va dire que j’ai surtout à cœur les gens du pays qui m’accepte. Tu chipotes moins avec ça, non ? »

Non mais vraiment, il aime jouer sur les mots celui-là. Alors, en vengeance, j’évoquais une certaine secrétaire sexy. Mais il me renvoya la balle avec ce petit rire digne d’un joueur de jeu de rôles. S’pèce de maître du jeu maléfique !

« Alors, déjà, qui te dit que je n’ai jamais fait appel à ses services ? Ensuite… »

Nope. J’allais dire qu’il n’y a pas que les boobs dans la vie mais là, soit j’allais me prendre une réplique sur ma sœur. Soit, un commentaire sur le fait d’avoir le look pour certains fantasmes gay. Détail qui ne me dérange pas dans le privée, mais j’avoue ne pas être très expansif sur le sujet. Armée et homosexualité, c’est plutôt bien accepté de nos jours. Mais moi, c’est surtout à cause de ma carrure que je n’assume pas.

« Ben, en fait, je cherche encore ce que je pourrais ajouter. » Finis-je par dire. L’index relevé, je complétais néanmoins.

« Mais je te la recommande, vraiment. C’est une chic fille. Même en dehors de son activité d’ailleurs. Et sinon, je me disais : tu aimes le sport ? Si oui, lequel ? Car tu vois, une autre façon de se détendre c’est de boire et grignoter devant un bon films ou un bon truc sportif. Si t’es ok, je nous organise une petite soirée sympa. Et on pourra toujours parler des filles qui nous plaisent. T’en pense quoi ? T’es partant l’ami ? »

Une bonne soirée entre potes, ça lui changerait.

« Par contre, pas de grades, pas d’armée, pas de boulot ce soir-là. Le but : se détendre. »

Et j’ajoutais en douce, dans un murmure audible que pour lui vu le reste de l’ambiance sonore :

« Je m’arrangerais avec les types des serres. Je sais que certains ont commencé à faire quelques liqueurs expérimentales avec le citron azurée, et aussi, un peu de vodka. »

On disait que c’était méchant de taper sur le physique, mais avec Luis, on avait toujours l’impression qu’il le cherchait. Cela permit donc à Thomas de répliquer dans les formes.

Avec ta tronche et ta carrure, j’aurais plus dit le futur Têtu que Playboy. Sérieux mon gars, te laisse jamais pousser la moustache, sinon là on pourra plus rien pour toi.

Quand le gaillard fit une remarque sur la famille, Thomas fit une réflexion sur la sienne et ses potentiels manquements, qui ne furent pas relevés par l’autre militaire. Pourtant, s’il lui avait demandé, il aurait parlé. Ils eurent ensuite un débat sur le patriotisme et Luis jouait la carte de ses doubles origines.

En gros tu bouffes à tous les râteliers selon ce qui t’arrange.

Il n’en pensait pas un mot, mais les provocations faisaient partie de leur amitié, comme le fait de parler femmes, fesses et blagues grasses. Cela alla jusqu’à faire référence à la câlineuse professionnelle de la colonie.

Parce que ta chère môman et ta précieuse imouto te laisseraient t’amuser avec une femme de petite vertue ?

Un petit rappel qu’il restait quand même très soumis aux femmes de sa famille.

Et toi, qui te dis que je n’ai pas fait appel à elle ?

Et dans son cas, c’était vrai, il avait eu de dures journées, s’était montré curieux et voulait s’assurer qu’elle était bien réglo. En gros, joindre l’utile au très agréable. Niveau compétence, aucun reproche à faire. Luis énonça ensuite sa nouvelle idée de génie, venir squatter chez lui pour une soirée bière, pizza et foot.

Je te dirais bien oui, mais j’ai le sentiment que c’est encore un de tes coups foireux.

Il y aurait forcément anguille sous roche, il commençait à connaitre l’animal, trop bien pour savoir que rien ne serait simple avec lui. A plus forte raison quand il commença à parler de petits mélanges maisons issus des serres.

Aux dernières nouvelles, rien n’a été déclaré officiellement comestible. Dans le meilleur des cas, tu risques la turista. Au pire, la réaction mortelle. Ton mélange, tu te le garderas pour toi mon vieux.

Luis semblait partir en pleine réflexion sur la remarque de Thomas et ce dernier le regarda d’un œil blasé quand il lui sortir la liste des magasines pour amateurs d’hommes nus de chez lui.

Franchement, j’ai l’air de m’y connaitre en culture LGBT ? Je suis hétéro je te signale.

Pas intolérant non plus, chacun faisait ce qu’il voulait, mais étrangement, il éviterait de fréquenter des douches publiques aux mêmes heures que l’autre armoire à glace, qui en rajoutait une couche en pensant à un compliment, tentant sans doute de retourner la boutade de Thomas.

Non mon gros, je suis simplement en train de me foutre ouvertement de ta gueule. Je sais que tu as sacrifié une partie de ta masse neurale au profit de ta masse musculaire, mais tout de même…

Heureusement que chacun ne pensait rien de ce genre de blague, sinon ce serait la guerre ouverte depuis un moment.

Elle le sait, mais tu rappliques quand même gentiment chaque fois qu’elle te siffle.

Il avait beau tenté de jouer le pseudo-rebelle, il était le gentil fifils à la sa maman et tout le monde le savait. Le baraqué lui parla ensuite d’une potentielle soirée et Thomas sentait étrangement venir le coup fumant, surtout quand il parla de faire des trucs avec des produits locaux pas encore certifiés par les scientifiques. Mais son ami se prenait visiblement pour Rambo.

J’aurais plutôt dit son cousin attardé, mais bon… Mais je te jure Luis, si jamais tu me fais un coup foireux, considères que ma promesse de ne jamais draguer Marie est directement rompue.

Les Forces Spéciales sont prêtes à toutes les saloperies, quitte à effectuer les pires embuscades, il restait à voir comment il allait en supporter une aussi vicieuse. Après tout cela, Thomas se leva à son tour, la sollicitude de Luis le touchait malgré tout, même après sa tentative de lui exploser le dos.

Bon aller, j’ai encore pas mal de travail demain, bonne nuit mon vieux.

Thomas l’abandonna donc et rentra chez lui se coucher.

Cet enfoiré ! Il a vraiment une langue de pute ! Mais au fond, on sait tout les deux qu’on apprécie ces boutades. Je suis le premier à déconner sur la différence entre mon intellecte et mes muscles après tout ! Mes résultats scolaires allaient un peu dans ce sens on dira… Mais c’est car je n’ai jamais été fait pour l’école. Enfin, les écoles civiles. Car celles militaires, j’y ai vite trouvé mes marques et repères.

« Que veux-tu ? Faut bien que j’assume de l’avoir trainer dans ce voyage, la vieille ! » Répondis-je, en rigolant.

Je terminais mon verre tranquillement, en ricanant un peu. A sa remarque pour Marie, je lui lançai le regard qui signifiait « Mec, soit pas con franchement. » Genre, j’allais lui faire un coup bas ? Organiser une bonne fête entre mecs, ce n’est pas un coup bas ! C’est un coup salutaire ! Si je lui en parle, il refusera. Moi, je veux qu’il apprenne à se détendre.

Aussi, je ne me sentais pas du tout menacer par sa réplique. Vu que je n’ai rien à me reprocher dans mon approche des choses. A sa réplique, je le saluais et le laissais partir, non sans le mettre en garde contre le sur-ménage. Moi, je retournais avec d’autres de mes hommes. Faut que je vois comment obtenir une telle quantité d’alcool et qui j’invite !