On a quitté le bar main dans la main, mais le trajet n'est pas resté à ce seul contact, et nous ne sommes pas restés sages. Disons qu'on a pris un peu plus de temps que nécessaire pour atteindre l'appartement de Thomas. Et lorsqu'on y arrive enfin, j'ai plutôt chaud, et mes fringues ne sont plus aussi bien ajustées qu'au départ du Trou. Du coup, lorsqu'il s'identifie pour nous ouvrir la porte, ce n'est pas vraiment sur sa décoration intérieure que mon attention se porte. Surtout que du peu que j'en vois, l'endroit est fonctionnel et parfaitement neutre. Un appartement d'homme seul et trop souvent absent.

Je remarque bien plus le canapé, plus proche que n'importe quel lit. Et l'absence de fenêtre avec vis-a-vis. Pour le moment, ça m'intéresse beaucoup plus que l'absence de personnalité des lieux. Mes mains s'égarent sous le tee-shirt moulant de Thomas, pour caresser la peau de son ventre, qui me paraît brûlante. Le désir a eu le temps de monter sur le chemin, et je me sens presque fébrile. Autant dire que la caresse ne m'apaise pas vraiment. Mais je cherche cette fièvre, cette brûlure. Sinon, je ne l'aurai pas suivi chez lui.

J'oublie le café promis, et le flirt est oublié. A peine la porte refermée derrière nous, que mes lèvres cherchent les siennes. Mes mains parcourent son ventre, goûtant la fermeté des muscles fins, découvrant les aspérités qui marquent sa peau. Peut-être de simples imperfections de la peau, peut-être des cicatrices. Je ne peux pas encore me prononcer, mais j'entends bien le découvrir avant la fin de la nuit. J'ai envie de découvrir son corps, de mes mains, de mes lèvres et de mes yeux. Il est encore tôt, et je compte en profiter.

Il est fort. Je m'en doutais, mais sa façon de me soulever comme si je ne pesais rien le confirme. Car je ne suis pas exactement légère, mais ça ne se remarque pas à sa façon de me porter. Et j'adore ça. Je trouve toujours très excitant un homme plus fort que moi, et ce n'est pas toujours gagné.

Il sait ce qu'il veut, tout autant que moi, et sa bouche est aussi impérieuse que mon propre désir. Les jambes nouées autour de sa taille, le dos planqué contre le mur, je laisse mes mains remonter au-dessus du tissu, pour les plonger dans ses cheveux. J'aime beaucoup la sensation de ses mèches entre mes doigts, assez inhabituelle chez un militaire. Mais c'est plaisant. Je me presse contre lui, désireuse de sentir sa chaleur à travers les vêtements qui nous séparent encore.

Il ne semble pas forcer non plus pour m'entraîner jusqu'au canapé, sur lequel nous nous retrouvons de biais, à moitié assis à moitié allongés, et toujours noués l'un à l'autre. Je profite de la relative stabilité pour retirer ma veste légère, qui était sensée me préserver de la fraîcheur nocturne. Autant dire que j'aurai pu m'en passer. Elle atterrit par terre, et mes bras retournent chercher une autre chaleur, autour du buste de Thomas.

Réalisant que je porte toujours mon noyau autour du bras, j'en défais l'attache, et il va rejoindre ma veste sans plus de cérémonie. Je doute très fortement d'en avoir besoin cette nuit. J'enlace à nouveau le brun, pour retrouver sa bouche, tandis que mes mains cherche le grain de sa peau.

Les lèvres sur ma peau me tirent un délicieux frémissement, et je penche la tête pour leur offrir une plus grande surface à explorer. La succion provoque un agréable pincement, et je devine que ma peau est rougie à cet endroit. Je m'inquiéterai demain d'une éventuelle marque, pour l'heure je savoure. Je savoure tant que je ne prête pas attention au manège de ses mains, appréciant leur contact sans surveiller leurs mouvements. Je suis donc très surprise de sentir soudain mon soutien-gorge se détendre, et mes seins brusquement libres sous mon débardeur. Je n'ai pas assez de poitrine pour qu'elle pèse réellement, mais la différence reste perceptible, au moins pour moi.

Un petit rire m'échappe, reconnaissant son habileté. Car je ne suis plus assez naïve pour croire que ce n'est pas intentionnel. Pas avec une telle maîtrise dans le geste. Gênée par le sous-vêtement ballant, je me redresse, et retire d'un même geste ce qui couvre et dissimule encore mon torse. Mais je ne compte pas en rester là. Mes mains, retournant sous le tee-shirt de Thomas, en saisissent l'ourlet, et remontent pour passer le vêtement par-dessus sa tête.

Bien que tamisée, la lumière est suffisante pour que je puisse savourer le spectacle, et je ne m'en prive pas. La silhouette est digne de son statut de militaire, et j'apprécie d'y promener mon regard, sans me dissimuler, le caressant des yeux avant que mes mains de reviennent, soulignant creux et reliefs, méplats et cicatrices. Je ne tarde guère à me rapprocher, frottant nos peaux l'une contre l'autre, mes dents saisissant son oreille pour la taquiner.

J'accompagne le changement de position, pour me retrouver au-dessus de lui sans lui tomber dessus, mes mains demeurant sur son torse, avec le jeu de ses muscles sous mes paumes. Ses mains sont aussi actives que les miennes, découvrant ma peau, la rugosité des cicatrices qui marquent tout le côté gauche de de mon épaule et de mon flanc, la douceur du derme en contraste. Et je ne peux pas prétendre que ça me laisse indifférente, des vagues de frissons hérissent sporadiquement le duvet de mes bras, trahissant mon ressenti.

Un baiser ardent me penche sur son torse, et je prends appui sur le canapé à côté de sa tête pour ne pas complétement basculer. La position est parfaite pour lui, car il n'a qu'à passer l'obstacle de ma ceinture pour atteindre mes fesses. Je me cambre sous la caresse ferme, et mes frissons se font soudain plus localisés au contact de ses doigts pressant mes muscles. Je suis plutôt "sensible" de cette zone, et il est assez facile de le remarquer. Je ne suis pas le genre de femme attirant les mains baladeuses, et un inconnu qui s'y essayerait prendre mon poing dans la figure, mais de la part d'un amant, c'est une caresse assez efficace et très agréable pour moi.

Je ne peux retenir un petit gémissement pressant, mais je me bâillonne en venant mordillant ses lèvres, avant de descendre sous son menton, puis de suivre l'angle de sa mâchoire, remontant de la pointe de ma langue jusque sous son oreille. Si ma main gauche me soutient, la droite n'est pas inactive, et mes doigts glissent de son épaule jusqu'à son nombril, puis descend encore pour saisir la boucle de la ceinture. Le modèle militaire ne m'est pas inconnu, et je l'ouvre facilement, tirant sur la sangle pour dégager les boutons du pantalon. Mais je ne m'y attaque pas immédiatement.

Tout en caressant sa peau juste au-dessus du tissu, je repose ma bouche contre son cou, juste là où palpite le pouls. Mais je ne le mord pas assez pour laisser une marque, je me contente de goûter des lèvres et de la langue, tout en descendant, très lentement, le long de son torse. Jusqu'à glisser une langue mutine sous son nombril, et descendre encore.

Ce genre de nuit, c'est toujours agréable de s'en souvenir, plutôt que de la noyer sous le flou de l'alcool. Pour dire les choses simplement, lorsque la fatigue arrive enfin à éteindre définitivement nos ardeurs, je n'ignore plus grand-chose de l'anatomie de Thomas, ni de la configuration de son appartement. Et je ne peux plus l'accuser d'être un vantard sans faire preuve de mauvaise foi. Disons qu'on a sans doute davantage occupé l'appartement en une nuit qu'il n'en a l'habitude...

Je suis plutôt contente de ne pas travailler aujourd'hui, ni au labo ni à l'Uther, et de ne pas être tirée du lit par la sonnerie de mon réveil. A la place, j'ouvre les yeux sur une vision tout à fait plaisante de mon supérieur très peu couvert. Le genre de vision qui pourrait donner envie de rester un peu plus longtemps au lit. Mais la délicieuse odeur de café qui l'accompagne, et qui vient plutôt de sa cafetière, me pousse plutôt à me redresser.

"Salut."

Si lui a profité de son réveil pour enfiler au moins un boxer, je n'ai pour ma part aucune idée d'où sont mes sous-vêtements. Je me rappelle où j'ai posé mon noyau, ma veste et mon tee-shirt, mais le reste... Cependant, ce serait assez ridicule de me montrer pudique maintenant, et lorsque le drap glisse autour de mes hanches, laissant ma poitrine à l'air, je ne cherche pas vraiment à me dissimuler.

"Ça me convient parfaitement !"

Je parle d'avoir un petit déjeuner au lit plutôt que d'être chassée, mais aussi de ne pas chercher d'histoire sérieuse. Le mariage n'a pas été une franche réussite pour moi, et même si je ne prétends pas ne plus jamais tomber amoureuse, il me faudra plus pour cela qu'une bonne entente et une nuit de folies.

"Café s'il te plaît, avec du sucre. Et j'ai passé une nuit plutôt agréable, et toi ?"

Il m'a demandé si j'avais bien dormi plutôt que comment j'avais trouvé ma nuit, mais je ne vais pas me priver de jouer avec l'ambiguïté. Même si le spectacle d'un bel homme avec du café de bon matin est hypnotisant, j'arrive à en détourner le regard pour fouiller la chambre des yeux.

"Hum, tu as une idée d'où sont mes fringues ?"

Je ne suis pas pressée, mais à un moment ou à un autre, je vais finir par en avoir besoin.

Dans la cuisine ? Allons bon. Ce qui m'étonne est moins l'endroit incongru que le fait qu'elle soit restée avec moi jusque là-bas. Dans mes souvenirs, ce n'était pas la première étape, la cuisine. Plutôt la trois ou quatrième je crois. Donc, qu'elle ait pu nous suivre aussi loin, c'est assez impressionnant. Je réponds à la boutade de Thomas par un grand sourire, tout en attrapant la lingerie fugueuse.

"Laisse-moi avaler un café, après on en reparle."

Car honnêtement, je suis encore un peu dans le cirage, et mon café du matin, c'est sacré. Et indispensable. Les œufs, le jambon, la confiture, la truite fumée, ça peut attendre, mais pas le café. (Oui, un petit déjeuner de chez moi au lit, c'est plutôt hasardeux pour les draps...) Ensuite, si il me propose de remettre un peu les activités de la nuit... Je verrai après le café en fait. L'idée est loin de me déplaire, mais est-ce que mon corps suivra ? Car même si je suis plutôt de nature sportive, entre la plongée et les entraînements, je sens déjà quelques courbatures dans des zones de mon corps habituellement moins sollicitées que cette nuit. Le commentaire précédent, sur la qualité de cette nuit, est très plaisant à entendre, même si en effet, ni l'un ni l'autre ne serions crédible à prétendre avoir passé une nuit banale.

Démêlant mes jambes du drap, je me lève pour remettre mon sous-vêtement, et j'en profite pour attraper mon téléphone, qu'une part de mon cerveau encore raisonnable cette nuit a gardé à portée de main, au cas où. Mais pas d'appel manqué, et le seul message est de Jonas, qui m'informe qu'il a passé la nuit chez moi pour garder notre fils, et se fout de moi en me souhaitant une bonne soirée. Vu que nous sommes partis ensemble hier, et sans nous cacher, il ne tardera probablement pas à deviner avec qui je l'ai passée. Je n'ai pas fini de l'entendre rigoler.

Ça fait partie de ce que je ne peux pas contrôler, et ça en vaut largement la peine, alors je ne m'en tracasse pas vraiment, m'intéressant davantage au petit-déjeuner promis. Je m'étire longuement, en sentant divers tiraillements se réveiller, mais bouger devrait les faire passer.

"Est-ce que je peux t'aider à faire quelque chose, à part boire ton café ?"

L'odeur de pain chaud fait gargouiller mon estomac, mais j'ai un peu de scrupules à simplement me faire servir, ce n'est pas dans mes habitudes, puisque même durant mon mariage ce genre de de petites attentions n'a pas duré. Un amant, ça me convient mieux qu'une relation, j'ai trop vu ce que ça pouvait donner.

Les "petits services" pendant la préparations du café, ça risque de finir en brûlures, et je ne tiens pas à expliquer à un médecin (ou pire, à mon fils) comment j'ai fini avec du café brûlant sur les épaules. Du coup, on verra après, pour le "remercier". Mais ça ne m'empêche pas de pouffer à sa boutade, que j'ai bien comprise comme telle. C'est agréable, d'avoir quelqu'un avec qui on peut boire, coucher et rire, sans se poser davantage de questions. Donc, on profite du déjeuner, que je mange sans chercher à cacher mon appétit. Je suis une bonne (une très bonne) mangeuse, et je n'essaye pas de passer pour une de ses femmes qui sont gavées avec trois feuilles de salades. Je suis trop trapue pour avoir la taille marquée et les cuisses fines, et je ne m'affame pas pour essayer de changer ça. Le pain frais et le café sont bienvenus et appréciés à leur juste valeur. Ce qui ne veut pas non plus dire que je bâfre comme une ogresse. Simplement que je me ressers sans scrupules.

Mais le ton soudain gêné de Thomas me détourne de ma tasse, et je fronce légèrement les sourcils à ses premiers mots. Il y a un problème apparemment, et sans être vraiment anxieuse, ça me tracasse un peu. Mais mon expression change dès que je comprends ce dont il parle, et je li sourit, en riant brièvement. Je bats rapidement des cils en prenant une voix outrageusement sucrée.

"Ah bon ? Tu ne veux pas que je t'appelle mon cœur au boulot en te réclamant tout un tas de privilèges et de passes droits ? Je ne comprends pas."

En même temps, je prends une pose déhanchée à la limite de la scoliose, ce qui ne colle pas tout à fait avec mes cicatrices et mes cheveux en épis. Je me redresse et reprends plus naturellement, mais toujours en souriant.

"Ne t'inquiète pas, je ne comptais pas mélanger sexe et travail. De toute façon, je sais maintenant que c'est le travail qui empiète sur le privé chez moi, pas l'inverse. A la limite, c'est à moi de m'inquiéter : tu y gagnes que j'ai plus de raisons de t'obéir, maintenant, parce que je vais pas vouloir te faire chier."

Lui obéir... Je n'aurai pas pu tourner ça autrement non ? Je replonge dans ma tasse, espérant sans y croire une seule seconde qu'il ne relèvera pas. En même temps, je comprends son inquiétude, et qu'il se sente obligé de préciser, il vaut mieux le faire maintenant que plus tard. Mais je ne suis pas ce genre de femme. Je marche plutôt dans l'autre sens, et fais passer mon boulot avant mes relations. Au moins, je sais que ça, il le comprend.

La matinée se passe plutôt agréablement ensuite, et bien plus légèrement. Je finis tout de même par rentrer chez moi, retrouver mon fils et mon ex désireux de me tirer les vers du nez. Mais je vais le laisser chercher tout seul, je lui fais confiance pour trouver. Je profite du reste de mon repos pour passer du temps avec Njáll.